Essai : Ritchey Swiss Cross, la magie noire de maître Tom.

Plus qu'un cyclo-cross, le Ritchey Swiss Cross n'est pas un vélo commun. De la route proprement dite au vélotaf en passant par quelques escapades hors du réseau bitumé, c'est un objet qui ouvre de nombreuses portes, que ce soit en terme de pratiques ou en terme de statut social. Rouler sur ce Ritchey c'est appartenir à une certaine caste. Récit d'une rencontre qui nous a conquis…
Publié le 03/02/2016 12:55 -
Tom Ritchey est connu pour être l’un des pionniers du mountain bike et le gourou de la marque d’équipements qui porte son nom. Mais le cantonner à ces seuls faits d'armes serait injuste, car ce serait faire abstraction de nombreuses années durant lesquelles il fut à la fois un coureur sur route de premier plan aux Etats Unis et un fabricant de vélos artisanaux très prolixe. Grand défenseur de l’acier, il aurait fabriqué lui-même plus de 1000 cadres et réparé, avant cela, une grande quantité d’autres. Bref, on comprend vite que le Logo Ritchey cache bien plus que du marketing et qu’en authentique passionné le grand Tom met de sa patte et de son âme dans chaque produit qu’il dessine. Le Swiss Cross est un témoignage de cette philosophie. En outre, il faut se souvenir que Ritchey a, entre autres, sponsorisé de nombreux champions de VTT et que ces derniers furent parfois aussi des champions de cyclo-cross à l'image deThomas Frischknecht et Henrik Djernis notamment. Certains souhaitaient également un Cyclo-cross Ritchey pour l´entraînement hivernal. Le Swiss Cross fut conçu pour cela et devint l'un des modèles emblématiques de la marque.
 
Une ligne racée et un look néo-rétro de toute beauté pour le Swiss Cross. Nous, on adore.
 
 
Visuellement, on comprend que Tom Ritchey mise sur une présentation assez traditionnelle, voire rétro. Il y a probablement dans cette stratégie l’envie de valoriser l'histoire de la marque et une certaine noblesse de l’art. L’envie aussi de ne pas succomber aux sirènes de la mode afin de proposer un produit indémodable. De fait, Ritchey n’a pas cherché à remplir toutes les cases dans la liste des raffinements « tendance » : pas de douille de direction conique, pas d’axe de 12 ou 15 mm, pas de cheminement en interne des câbles et gaines, le gourou privilégie la fonction et ne s’embarrasse pas d’arguments marketing. Il ne retient que ce qui lui semble judicieux, le jeu de direction intégré, la fourche en carbone et les freins à disque.
La douille de direction est strictement cylindrique mais elle intègre avec finesse le jeu de direction.
Un raffinement qui n'est réellement possible qu'avec l'acier.
 
La fixation de l'étrier de frein à disque est joliment intégrée entre la base et le hauban coudé spécifiquement pour cela.
 
 
Esthétiquement, le résultat est vraiment séduisant même si l’on sait bien que les goûts et les couleurs sont l’affaire de chacun. La finition est super chic, les soudures TIG (Tungsten Inert Gas) sont fines et régulières, irréprochables, chaque détail est très soigné. Même si la production du cadre est sous-traitée en Asie, on imagine bien que l’expert ne pouvait se contenter d’une fabrication juste moyenne. On apprécie particulièrement certains détails de fabrication à l’image du serrage de tige de selle intégré à la naissance des haubans, une solution technique ancestrale, mais techniquement excellente. On aime aussi les micro pattes « coques" dessinées par Ritchey, l’intégration réussi de la fixation de l’étrier de frein arrière et la jolie courbure du hauban gauche induite. Dans l’ensemble le design minimaliste faisant appel à des tubes ronds de diamètre modeste donne un cadre à la ligne simple, mais racée, un parfait compromis entre tradition et modernisme que l’on a hâte de mettre à l’épreuve du terrain.
Le serrage de la tige de selle intègre la naissance des haubans. Rétro mais classe et éprouvé.
 
La signature du maître pour le design seulement ne fait pas l'impasse sur son passé de soudeur.
 
Avec un patronyme comme Swiss Cross, on comprend qu’il y a bien du cyclo-cross dans ce Ritchey. Mais l’on peut aussi considérer la traduction littérale :  ce vélo serait l’arme absolue pour traverser la Suisse, par les routes et les chemins… Il est clair qu’avec un look comme celui-là, ce vélo peut intéresser autant les cyclo-crosseurs compétiteurs passionnés amateurs de matos avec une âme que les commuters (vélotafeurs) sportifs à la recherche d’une monture prestigieuse. Nous verrons qu’il s’adresse à un public bien plus large encore…
 
Au premier contact, le Swiss Cross propose une géométrie assez polyvalente, mais la position s’avère tout de même assez sportive. Logique, il est aussi pensé pour la compétition. Les pilotes moins sportifs, les commuters ou ceux venant du VTT pourront, comme nous l’avons fait, adopter une potence plus courte que celle proposée initialement sur ce modèle en taille 57 cm (80 mm contre 110 mm). Voilà qui change radicalement la donne et fait de ce vélo un outil d’une polyvalence tout à fait remarquable. Nous l’avons utilisé quotidiennement pour le trajet dodo-boulot et retour, sur route et sur pistes forestières, nous l’avons emmené dans des sorties longues typées « cyclo » et nous lui avons même infligé plusieurs virées de vrai tout-terrain, le genre de tour que l’on fait généralement plutôt à VTT.
 
Les cocottes Shimano Ultegra offrent un confort agréable en toutes circonstances et le freinage est à la fois fiable et confortable.
 
On regrette un peu que le passage des gaines le long de la douille ne soit pas protégé.
Les frottements attaquent inévitablement la peinture ce qui est regrettable sur tous les vélo mais tout particulièrement sur ce Swiss Cross.
 
 
Chaque jour nous avons apprécié le caractère vivant du cadre en acier. Les petits tubes laissent s’exprimer toute l’élasticité du matériau et procurent un comportement à la fois dynamique et confortable. Certes on ne retrouve pas la nervosité explosive de certains cadres en carbone, le poids du vélo, proche des 10kg, est toute même perceptible. Lors de la mise en mouvement, les accélérations sont néanmoins franches et les relances n’ont rien à envier aux montures les plus performantes. Les sensations sont juste un peu plus feutrées. Lorsqu’on est lancé, le Ritchey garde facilement le rythme et la vitesse sans nécessité de fréquente remise en route. Sur route la maniabilité est remarquable et le freinage puissant et facilement dosable procure une sécurité que l’on n’a jusqu’alors pas rencontrée sur un vélo de route. Probablement qu’un gros passif de vététiste permet de mieux apprécier le freinage à disque, mais avouons que c’est sans comparaison avec le freinage sur jante. Il n’y a pas photo, pour ralentir ou s’arrêter c’est tellement plus efficace.
Lors de nos parcours urbains et durant les sorties typées cyclo nous avons profité de ces atouts atouts pour jouer avec le Swiss Cross, effaçant les trottoirs et les terrepleins, « bunny-upant » les petits obstacles. Bref on a pris beaucoup de plaisir à son guidon.
 
Les pattes Ritchey sont petites, discrètes, mais très belles. D'autres cadreurs n'hésitent d'ailleurs pas à les utiliser sur leurs productions.
 
Logic, le nom donné aux tubes Ritchey est probablement l'une des seules concessions faites au marketing.
Il s'agit en fait de tubes en acier cromo triple butted (3 épaisseurs différentes selon les zones de contrainte)
 
 
Sur routes dégradées ou sur pistes, les mains sur les cocottes, le confort est appréciable grâce aux pneumatiques Shields maison en 35. Ces derniers se révèlent agréables et sûrs sur tous les revêtements, mais ils s’usent relativement vite. En vrai tout terrain, c’est une autre histoire, on n’est quand même pas sur un VTT. La fourche est rigide et précise, mais elle secoue lorsque le sol est vraiment dégradé. On peut néanmoins attaquer franchement, car le vélo présente un comportement précis et fiable en toute circonstance sauf lorsque le sol est trop gras pour que les pneus assurent une adhérence suffisante. Les mains calées dans le creux du guidon, on s’est fait quelques frayeurs dans certaines descentes un peu trop engagées. Mais c’est passé sans éclat.
Dans les grimpettes, la transmission Ultegra en doubles plateaux 50/34 avec cassette 11/32 est assez élitiste, mais elle offre une bonne polyvalence pour les utilisateurs ayant un bon bagage physique.
On a réussi a escalader quelques raidars bien velus en tout-terrain.
 
Testé pendant plusieurs mois, le Swiss Cross nous a réellement charmés tant par sa présentation que par son comportement. C’est un vélo qui permet de goûter au cyclisme différemment. Quand on n’est pas un cyclo-crosseur compétiteur ou un cyclosportif féru de performance pure, on peut envisager de couvrir de nombreux kilomètres avec bonheur au guidon du Ritchey. Les passionnés de vélo sous toutes ces formes, les pédaleurs au long cours peuvent trouver dans cette monture un compromis idéal pour rouler sans se fixer de limites. Au guidon du Swiss Cross, on passe de la route aux chemins sans état d’âme et avec plaisir. On va bosser sans se prendre la tête, en exploitant toutes les possibilités du réseau (l’ajout de garde-boue peut être un plus pour cela). On se balade sans se soucier de la présence ou de l’absence de l’asphalte. On s’entraine confortablement. On part à l’aventure. Voilà probablement la philosophie qui se cache derrière le terme Gravel même si Ritchey ne capitalise pas sur cette tendance là non plus. Son truc à lui c'est rouler, rouler, rouler…
 

Cadre : Ritchey SwissCross Disc

Fourche : Ritchey Cross WCS Carbon

Direction : Ritchey WCS Drop In 1-1/8"

Dérailleur AV/AR : Shimano Ultegra 2x11s

Freins : Shimano Ultegra Disque hydrauliques 160mm

Pédalier : Shimano Ultegra 50/34 – Manivelles : 170mm (49/51cm),172.5mm (53/55cm), 175mm (57/59cm)

Boîtier : Shimano Ultegra BBR60 (BSA)

Cintre : Ritchey EvoMax WCS Blatte – 42cm (49/51cm), 44cm (53/55cm), 46cm (57/59cm)

Potence : Ritchey C-220 WCS Blatte – 80mm (49/51cm), 90mm (53cm), 100mm (55cm), 110mm (57/59cm)

Tige de selle : Ritchey Link WCS 350x27.2mm Blatte

Selle : Ritchey Streem WCS Black

Roues : Ritchey Zeta Disc WCS

Chaîne : Shimano Ultegra HG700 11s

Cassette : Shimano CS-5800 11s 11/32T

Pneus : Ritchey Shield 700x35 Comp

 

Poids : 9,8kg en taille 57 avec pédales Ritchey

Prix : 1403,90€ le kit cadre + fourche. Environ 3800€ le vélo complet

 


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