Le freinage à disque pour la route fait encore polémique, mais pour le cyclo-cross ou encore le Gravel, il n’y a plus débat. Pour autant, tous les cyclistes ne sont pas encore vraiment familiarisés avec l’hydraulique. Le manque d’expérience, le manque de confiance en la fiabilité des systèmes, l’absence de maîtrise de l’entretien, la crainte de la purge… Les « freins » sont nombreux au développement du frein à disque hydraulique dans le cyclisme. De fait l’offre du fabricant taïwanais Juin Tech avec ces étriers hybrides est particulièrement intéressante sur le papier à plus d’un titre. D’abord elle permet de passer à l'hydraulique sans changer ses commandes mécaniques d’origine, quelle que soit la marque, si l’on est possesseur d’un cyclo-cross ou d’un Gravel à freins à disque mécaniques. Ensuite, ces freins offrent surtout un entretien, a priori, d’une simplicité incomparable.
On le voit, plusieurs couleurs sont proposées pour les Juin Tech.
Histoire de mettre à l’épreuve les atouts affichés et imaginés de prime abord, nous avons mis ces freins à l’essai durant plusieurs mois, dans toutes les conditions, sur un Gravel randonneur équipé de commandes Sram Rival 1. Compte rendu :
Avant montage, on prend les étriers pour les détailler techniquement. Doubles pistons opposés, corps en aluminium en deux parties unifiées par deux solides vis Allen, l’étrier est assez compact et ressemble beaucoup à un étrier hydraulique classique. On remarque juste la butée de gaine et le levier réglable qui actionne le piston primaire qui trahissent la commande mécanique de l’ensemble. Ce petit levier dispose d’une molette qui permet d’ajuster l’attaque des plaquettes. La butée, elle-même dispose d’un système de réglage permettant de jouer sur la tension du câble. On y reviendra, ce n’est pas forcément ce qui nous a le plus séduits. La finition anodisée est propre et sans bavure, sans reproche et plusieurs couleurs sont proposées.
Le système hydraulique utilise de l’huile minérale moins agressive pour l’environnement et les matériaux que le traditionnel DOT (liquide de frein standard). Autre atout physique ou plutôt chimique de l’huile minérale, est de ne pas se charger en humidité avec le temps, de ne pas créer de bulle d’air et donc de ne nécessiter, en théorie, aucun entretien, le circuit étant totalement fermé dans ce petit volume.
A l'avant, pas de soucis, la bride de serrage du câble et la molette de réglage sont parfaitement accessibles.
Les rotors 6 trous (standard international) livrés avec les R1 font 160 mm de diamètre, le bon compromis pour un usage agressif sur route, Gravel et cyclo-cross.
Le poids sous les 150 grammes est tout à fait compétitif : 141 gr l'étrier seul.
La molette permet d'ajuster la réponse du freinage.
Montage
Le montage de l’étrier n’est ni plus ni moins compliqué que pour un étrier mécanique standard. On note simplement que le bridage du câble n’est pas très aisé sur un vélo dont les fixations sont situées entre les bases et haubans. Pas simple de positionner la clé 6 pans. C’est au niveau réglage que nous avons le plus tâtonné. Il fallait trouver le bon compromis de tension du câble et d’attaque du levier actionnant le piston primaire sans que les plaquettes soient constamment en contact avec le disque. C’est d’ailleurs ce qui fâche un peu par la suite lorsque les plaquettes s’usent et qu’il faut ajuster la tension du câble en dépit du rattrapage automatique du système hydraulique. Sur le principe, il suffirait pour cela de manipuler la petite molette du levier, mais si quelques tours rapprochent en effet les plaquettes usées du disque ça a pour effet de jouer légèrement sur l’angle d’attaque du levier et la progressivité du freinage en pâtit quelque peu.
A l'arrière, avec une fixation de l'étrier entre la base et le hauban, la bride de serrage du câble et la molette de réglage peuvent ne pas être très accessibles.
A l’usage
Une fois le réglage réalisé et après rodage (une à deux sorties suffisent à atteindre le rodage parfait), les premiers freinages s’avèrent un peu moins mordants qu’avec des Sram Rival HR pour donner une référence. Certes c’est un peu moins puissant qu’un système 100% hydraulique, mais c’est quand même satisfaisant et c’est en tout cas largement suffisant pour assurer des décélérations précises et des freinages d’urgence sécurisant, même dans les descentes. On s’attendait à une variation sensible de comportement dans les descentes longues nécessitant de fréquents ralentissements, mais nous n’avons pas réellement constaté de problème de ce côté-là même si notre test s’est limité à des collines et que nous n’avons pas posé nos roues en montagne. Quoi qu’il en soit, le freinage reste constant. Nous avons en revanche observé une usure assez rapide des plaquettes montées de série. Il est vrai que la météo très humide voir mouillée a largement soumis les freins à la boue et l’eau : un mélange particulièrement abrasif qui n’a pas fait de cadeau. Mais quand même, le premier jeu de plaquettes n’a pas tenu 1000 km, ça fait peu. Et pour tout dire, lorsque les plaquettes sont usées, les Juin Tech se montrent franchement moins convaincants. Au moment de changer ces pièces d’usures, on a remarqué que la garniture d’origine était assez tendre. Ça ressemble à de l’organique. Ceci explique peut-être cela. De fait, plutôt que de faire un échange standard, nous avons essayé de remplacer les plaquettes d’origine pour des plaquettes métalliques génériques compatibles. Et ça fonctionne à condition de conserver le ressort de rappel d’origine nettement plus fort que les ressorts habituellement fournis avec les plaquettes de rechange. Ça fonctionne, mais ça ne fait pas de miracle, disons-le sans détour, ainsi équipés, les Juin Tech procurent un freinage assez décevant, peu progressif et désagréable. Vous actionnez les leviers de freins et ça freine mollement sur les 3/4 de la course. C’est seulement en bout de course, les doigts crispés sur les leviers, que le freinage intervient réellement en bloquant les roues qui glissent aussitôt sur sol mouillé. Bref, pas très sécurisant, ni confortable. Nous avons donc remonté des plaquettes d’origine Juin Tech et le freinage est alors revenu à des standards plus satisfaisants. Et cette fois, sur la durée, les plaquettes ont offert une durabilité plus conforme à ce que nous constatons habituellement : pas d’usure prématurée après plus de 800 km. Dans ces conditions, difficile d’être catégorique sur ce qui s’est réellement passé avec le premier jeu et avec les plaquettes de rechange « générique » . L’important est d’avoir retrouvé un freinage convenable.
Les R1 sont la version Post-Mount ou comme ici IS (International Standard) des Juin Tech. Pour le Flat-Mount, il faut se tourner vers les F1. Le X1 est plus "chic" et dispose de plaquettes refroidies (compatibles Shimano) et utilise un disque flottant inox/alu de 160 mm.
Epilogue
Au final, ces Juin Tech R1 nous ont d’abord séduits pour le bon rapport simplicité-poids-prix-freinage. Mais du côté du débit, on retient le réglage moins simple qu’on l’espérait et cette mauvaise expérience avec les plaquettes (le premier jeu qui n’a pas tenu la distance et celles de remplacement qui n’ont pas assuré un freinage efficace) ce qui nous a un peu pourri la vie pendant un petit moment avant de retrouver un freinage convenable avec le second jeu de plaquettes Juin Tech. En dépit de ces aléas, on retiendra que l’offre Juin Tech ne manque pas d’intérêt avec des atouts économiques et mécaniques qui séduiront ceux qui misent sur la simplicité mécanique, notamment les voyageurs au long cours, et ceux qui sont définitivement allergiques à la purge des systèmes hydrauliques.
Prix : 179,95€ le set avant et arrière.
Distribué par 2-11 Cycles, plus d’infos sur le site